Bulle Du mercredi 16 août 2006

Le poids des mots, le choc des images

Quelle que puisse être la réputation que se traîne ce reportage, depuis qu'il s'est fait remarquer à travers de multiples remises de prix, on ne peut pas s'attendre à un tel choc.
Le reportage en question, dont je me suis accordé le visionnage ce soir même, est en l'occurence l'essentiel Cauchemar de Darwin d'Hubert Sauper, au titre on ne peut plus véridique.

Certes, le monde est pourri, le libéralisme et la mondialisation y sont pour beaucoup. Les riches s'enrichissent sur le dos des démunis qui s'appauvrissent. La morale serait presque affligeante de banalité, si elle était prise hors contexte.
Sauf que le contexte est plus que lourd ici, dans ce film. Lourd et percutant.

Tout part du berceau de l'humanité : le lac Victoria (deuxième plus grand lac du monde) en Tanzanie, dans lequel quelqu'un eut un jour le dessein d'introduire la Perche du Nil, poisson très apprécié des pays européens.
Dans un premier temps, le désastre sera uniquement de nature écologique. L'espèce se répand et met à mal le fragile écosystème de ce lac, vanté pour ses multiples variétés piscicoles.
Puis devant les vertus économiques de ce gros poisson très prisé, c'est un véritable drame humain qui va prendre place.
En effet, la main-d'oeuvre tanzanienne très prisée pour son faible coût produit à grande échelle un poisson dont raffollent les Européens et ce alors que la famine se répand parmi la population locale.

Le scandale vire en dégoût profond quand on apprend qu'en plus de ça, les entrepreneurs locaux trempent dans un curieux marché et que l'aéroport local servant aux cargaisons de poissons est une plaque tournante du trafic d'armes, lesquelles sont ensuite fournis aux peuplades africaines promptes à la révolte de par la dureté de leurs situations. Bref, c'est à un véritable réseau d'exploitation de la misère humaine qu'on assiste là et la démonstration est au moins aussi probante que les faits bruts ne peuvent l'être : le réal a réellement su donner un rythme à son reportage, il a su créer une progression palpable qui en ferait presque un thriller politique. Chaque scène a son importance et apporte une dimension nouvelle à la situation. Que ce soit les inteventions des populations environnantes (notamment le gardien des entrepots) ou des pilotes chargés d'organiser l'envoi des cargaisons vers la Russie, aucune d'entre elles n'est gratuite.
Le travail du journaliste est exemplaire, dans ce qu'il n'appuie jamais les images. Ces rares questions ne contrarient d'ailleurs jamais les interventions des témoins.

C'est donc un vrai grand film qu'il faut se forcer à voir, parce que la vérité ne peut éclater qu'avec cela et que celle-ci mérite d'éclater. Et tant mieux si on reste assez longtemps hanté par ces images d'enfants se disputant les maigres restes des caracasses des perches du Nil.

C'est aussi ça le cinéma, ça a aussi été ça et ça l'est de moins en moins : dénoncer, crier au scandale, amener à la réflexion. C'est si rare quand ça arrive que ça mérite d'être souligné, surligné et entouré au feutre indélébile.




3 Comments:

Anonymous Anonyme said...

dès que je peux je le regarde !!
je comprends de plus en plus pourquoi vous vous entendez aussi bien Sam et toi !!!

19 août 2006, 00:00:00  
Anonymous Anonyme said...

dès que je peux je le regarde !!
je comprends de plus en plus pourquoi vous vous entendez aussi bien Sam et toi !!!

19 août 2006, 00:23:00  
Blogger - AcidCitrik - said...

Le mystère Sue Ln se propage encore...

20 août 2006, 13:30:00  

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