Bulle Du lundi 20 novembre 2006

La Cène de Girbaud réhabilitée



Et voilà.

La semaine dernière, la Cour de Cassation a mis fin à une infamie jurisprudentielle rendue un an plus tôt, au nom du "respect des croyances".
L'affiche publicitaire en question, tirée d'une campagne d'un créateur de mode, parlera sans doute à beaucoup de monde, tant l'ampleur médiatique du fait divers fut importante.

A l'époque donc, les juges du fond avaient censuré (en référé, siouplait) la publicité, laquelle constituaient une "injure aux sentiments des catholiques". L'action avait été menée par une association des Evèques de France, qui, vraisemblablement, ne digéraient pas de voir les apôtres grimés en femmes (pourtant jolies et fort bien apprétées pour l'occasion, c'eût été un bel hommage).
Malheureusement pour eux, le buzz aura certainement été très favorable à la marque de vétements qui avait lancé la campagne, mais la décision a été cassé, au motif qu'il n'y a pas lieu de parler d'injures personnelles alors qu'il ne s'agissait que de la reprise d'une image religieuse sans mention outrageante supplémentaire. En d'autres termes, l'argument aurait valu si l'affiche comprenait la phrase "Les Chrétiens sont stupides.".
Rien de plus normal que cette décision, donc.

D'autant que, sur le fond, il est difficile d'admettre qu'on interdise un tel détournement d'image, alors même que cette image ne repose que sur des croyances non-averées. Qui pourrait dire que la Cène originelle a une quelconque légitimité, alors même qu'elle fut elle-même le fruit de nombreuses critiques par les religieux ?

Plus que le respect des croyances, c'est surtout une nouvelle tentative des autorités religieuses de censurer tout ce qui pourrait nuire à leur image et qui ne cadrerait avec la vision du monde qu'ils essayent d'instaurer. On est pas loin de la frontière du délit de blasphème...

A titre personnel, ce débat arrive à un moment où je m'intéresse de près à ces considérations religieuses et notamment à la force de l'imagerie religieuse :
Je me suis enfin autorisé le visionnage de La Passion du Christ de Mel Gibson. Même si j'ai trouvé une certaine force à ce film, il me semble que la vision développée par le réalisateur est plus à même de heurter les croyances. Sa version du calvaire du Christ n'est pas unanimement partagée, et pourtant les religieux ont loué ce film comme jamais.

J'ai quelques difficultés à distinguer le film en question et l'affiche, chacun n'étant que la reprise personnelle d'une imagerie religieuse répondant à des intérêts autres que le respect des croyances.
Difficile de dire quel est le plus offusquant des deux ?

Aucun ? Je crois que c'est la bonne réponse.

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